Mon nom est le Baron Gustave Alexander von Trier. Ce n'est qu'un avatar...j'en ai quelques uns. Ces derniers temps (malgré la douleur que porte ce souvenir), je me suis laissé porter à la dérive, ballotté par des passions qui n'ont que peu en commun avec la personne que je suis réellement. Alors qui suis-je?
Le début de mon histoire, du moins autant que je m'en souvienne, commence dans un autre siècle. J'étais capitaine, un homme de la mer de profession. J'ai parcouru les grands océans, laissant les étoiles guider ma vie, bravant les colères des éléments. Mais quel espèce de pari fou m'a fait monter rapidement les rangs pour devenir capitaine d'un grand navire dont vous avez sûrement entendu parlé, le Titanic ? Rien que son nom me remplis de fierté et de crainte... Notre première destination était New York. J'ai dû faire le trajet par train depuis Vienne jusqu'au port de South Ampton, premier lieu d'embarcation du Titanic. Avec moi, mon assistant, un brillant marin, dont je préfère taire le vrai nom et que j'appellerai à titre d'exemple "Wilhelm". En arrivant au port, Wilhelm m'a avoué qu'il vivait là le plus grand moment de sa vie. On a fumé deux cigares ensemble et un cocktail fameux dans les faubourgs de la ville. Mais de retour à notre hôtel, la veille de notre départ, je me sentis malade et quelque part en route, je m'effondrai. Je me réveillai quelques jours plus tard, pieds et mains liés, attaché à un tonneau. Wilhelm avait disparu. J'entendis des voix venant de la pièce à côté. Malgré une vive douleur dans le crâne, je réagis promptement et réussis à détacher les liens qui me retenaient prisonnier. De retour à l'hôtel, je découvris avec horreur le naufrage du Titanic à la une des journaux ! Mais mon plus grand choc allait être à la lecture de l'article qui racontait les détails du naufrage, précisant que le capitaine et son assistant "Wilhelm" avait péri avec le bateau ! Selon ce journal estimable, je n'étais plus en vie. Mais comment était-ce possible? Qui avait pris ma place et mon nom? Une froide panique s'empara de tout mon corps. A ce moment, je reconnus Wilhelm entrant à l'hôtel avec une équipe de gens qui m'étaient familiers sans que je sache où je les avais rencontrés. Bientôt tout allait s'éclaircir...Je sentis un pistolet pointer dans mon dos avant de perdre connaissance. Je me réveillai dans ma chambre d'hôtel. Par intuition, je compris que cette équipe était responsable pour le naufrage du navire. Mais si le capitaine " avait péri avec le bateau", pourquoi étais-je toujours en vie? Quel avantage de me garder en vie et prisonnier, mettant en scène ma mort? Quel était le pauvre figurant chargé de la lourde responsabilité d'amener le bateau et son équipage dans son destin épouvantable et ultime? Une chose était certaine, Wilhelm m'avait trahi et le voilà qui entrait dans la pièce avec son équipe, un sourire accueillant au visage, et les mots qu'il allais prononcer me plongeai dans l'embarras le plus total: "Félicitation Capitaine, vous avez réussi à mener à bien notre plan magnifique!
-Qu'est-ce que j'ai à voir avec ce désastre Wilhelm ? répondis-je.
Wilhelm commença le récit d'une histoire diabolique et fallacieuse. Nous avions, selon lui, réussi à piéger les agents de l'intelligence secrète britannique en leur faisant croire qu'ils avaient réussi dans leur but de nous assassiner.
-Pourquoi auraient-ils cru une telle absurdité? demandai-je.
-Car c'est eux qui ont placé la bombe responsable du naufrage ! répondit Wilhelm, visiblement amusé par mon incrédulité.
L'explication de Wilhelm répondait à mes questions tout en approfondissant mon incompréhension. Dans les abîmes de ma raison une nouvelle question prenait la forme d'une bête prête à me dévorer: si j'avais trouvé la mort à bord de ce malheureux navire, comment pourrais-je vivre désormais? Serais-je condamné à vivre le reste de mon existence dans une jeu d'espionnage dont je ne comprenais ni les règles ni le but?
-Vous m'avez privé de ma vie Wilhelm! Je me levai pour mieux me confronter à ce monstre quand des coups secs frappés à la porte interrompirent mon mouvement.
-Police! Open the door!
Dans la panique, cette équipe de fous prirent la fuite par la fenêtre, tandis que moi, porté par le désespoir et la colère, je fonçai à travers les policiers, évitant leurs coups de bâton. Ce fût un moment bizarre et exaltant en même temps; moi, un cadavre ressuscité et une énigme ambulante, une personne ignorant son identité, dépossédée de mon passé et au futur incertain, avec pour but unique de retrouver l'homme qui détenait le secret de mon destin: "Wilhelm".